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L’arbitre ne permet pas à une université de changer unilatéralement les tâches d'un professeur au cours du trimestre

Un professeur conteste le retrait de sa charge de supervision de deux étudiants. Il s'agissait d’une mesure disciplinaire. Le processus de modification des tâches professorales à la convention collective n’a pas été respecté. 

 

Syndicat des professeures et professeurs de l’Université de Sherbrooke c. Université de Sherbrooke, Grief No. 2020-01 (Saeed Shobeiri) 

 

Respect des directives – Évaluation – Retrait de charge de supervision – Contestation de la mesure - Harcèlement psychologique – Courriel – Persistance – Recours théorique – Droit de compensation – Liberté académique – Convention collective – Mesure disciplinaire – Université – Professeur 

 

 

Faits 

 

Il s’agit d’un professeur contestant le retrait de sa supervision d’étudiants. Le tribunal devait alors se positionner sur la conformité de cette mesure à la convention collective. Également, le professeur avait contesté la mesure sous l’angle de la liberté académique et avait déposé une plainte pour harcèlement psychologique. 

 

Le litige survient lorsque le professeur souhaite modifier les modalités d’un programme « d’essais-interventions ». Plus précisément, il s’agit de l’évaluation des étudiants. Les directives prévoient que cette évaluation doit se tenir en mode présentiel devant jury et le professeur devait être membre du jury. Il a communiqué de nombreuses fois avec le doyen de sa faculté pour repousser la date d’évaluation ou tenir l’évaluation en mode virtuel. Chaque fois, on lui répondait qu’il devait s’en tenir aux directives du département. Sans que l’arbitre n’y voie une réelle justification, le professeur indique alors à son directeur qu’il ne pourra pas être présent au jour de l’examen. Après discussion, le directeur lui dit de s’adresser au Doyen. Après avoir persisté auprès du Doyen, ce dernier lui avise le retrait de ses charges de supervision auprès des étudiants visés par ces évaluations. Ce courriel avait un caractère d’exaspération et d’irritabilité. 

 

 

Analyse 

 

Il est pertinent de noter que le professeur avait quitté son emploi auprès de l’université au moment du litige. L’arbitre note toutefois que cela n’enlève pas la pertinence du débat entourant la convention collective et le harcèlement psychologique. En effet, le débat serait qualifié de “théorique” si le professeur n’avait aucune possibilité de réclamation. Ici, le professeur pouvait toujours son droit de compensation monétaire et son droit de faire corriger des faits à son dossier d’employé. 

 

L’arbitre note le rôle de la convention collective dans les relations de travail du professeur. Celle-ci établit notamment des mécanismes et des modalités que l’employeur doit suivre dans l’exercice de ses droits de direction. Ici, la convention collective prévoit le processus à suivre lorsqu’un doyen désire modifier les tâches professorales d’un professeur. En effet, les professeurs déposent un formulaire identifiant leurs tâches professorales projetées pour l’année à suivre. Le doyen peut les modifier en le notifiant au moins un mois avant le début d’un trimestre. Si la charge doit être modifiée après ce délai, le consentement du professeur visé est nécessaire. 

 

L’arbitre note une atteinte à ce processus. En effet, le retrait des charges sans le consentement du professeur allait, selon l’arbitre, « bien au-delà d’une simple réorganisation administrative. » (par. 77) Ici, l’arbitre qualifie le retrait des charges comme une mesure disciplinaire. En effet, le doyen a indiqué considérer comme comportement répréhensible le refus du professeur de respecter les règles. Il a également considéré que le professeur avait antérieurement fait l’objet d’un avis disciplinaire sur la question et qu’il s'agissait selon lui d’insubordination (par. 83 et 84). Comme la procédure établie à la convention collective n’a pas été respecté, le tribunal conclu à la nullité de la sanction. Ainsi, il ordonne à l’Université de retirer du dossier du professeur tout avis concernant le retrait des charges de supervision. 

 

La convention collective prévoit également une définition du harcèlement psychologique et de la liberté académique. L’arbitre note que le courriel du Doyen annonçant le retrait des charges de supervision pouvait certes heurter le professeur, mais l’ensemble des faits ne permet pas de conclure à un cas de harcèlement psychologique. Également, l’arbitre ne considère pas que l’exigence de procéder aux évaluations en présence physique porte atteinte à la liberté académique du professeur.





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